
Introduction
Très chères toutes et tous…
Cet article est né de la journée d’initiation chamanique proposée par Aya de « Ame Chamane » en décembre dernier.
Le Néochamanisme fait couler salive et encre depuis déjà deux décennies au moins. Beaucoup de « on dit » et de « il parait » – peu de faits. Mes lectures historiques et anthropologiques à ce sujet mais également mes expériences personnelles m’ont donné à rédiger ce condensé d’infos quant à cette approche et les paradigmes associés – tout en restant extérieur à toute pratique régulière ou engagement particulier.
Terra-Artemisia est un lieu dans lequel ce type de connexion au vivant sur un plan subtile et non moins concret a toute sa place. L’espace de notre bel écrin est donc ouvert au chamanisme et aux formateurs de qualité.
Bonne lecture et n’hésitez pas à laisser vos commentaires…

L’anthropocentrisme – c’est cette idée que l’Humain représente l’espèce dominante sur Terre. Une vision du monde qui nous place en unique héritier de « toutes choses » – Nous serions donc faits à l’image de « Dieu » ou sorti de la cuisse de Jupiter – nous disposerions de note environnement à notre guise et seront jugé sur pièce à la fin des temps.
Cet imaginaire collectif ne semble pas résister à la crise écologique et l’effondrement du vivant, symptôme manifeste de notre relation enthropique à la biosphère qui s’épuise en néguenthropie.
Autrement dit, ce sentiment de toute-puissance se heurte à la nécessité de réinterpréter le dérèglement climatique à la lumière anthropocentrique… Mais pas seulement. Les relations humaines pourraient, elles aussi, être remises en question avec cette idée en tête. Malheureusement, ce paradigme est fortement ancré en nous et nos sociétés perpétuent le mythe de notre supériorité – souvent sans conscience – une croyance devenue trop lourde, mais qui est une dure à cuire.
Notre dépendance au milieu naturel est indubitable. Quant à notre position hiérarchique – les faits sont là – l’Humain reste une simple expression du « vivant » parmi tant d’autres… Uniques sans être indispensables
Mais on ne lâche pas si facilement son trône…
Nos capacités en tant que créature biologique restent relatives aux critères de référence. Il est dès lors bien commode de sélectionner l’intellect comme preuve absolue de notre grandeur – sachant d’avance que cette grille de lecture nous est favorable.
Au demeurant, les cachalots savent plonger plus d’une heure à de 1000 mètres de fond, le tout en percevant leur environnement avec leur sonar biologique… le même cétacé serait bien incapable de traverser un désert… La nage d’un humain lui paraitrait ridicule et il nous penserait sans doute néfaste pour son environnement naturel et puis franchement hostile à son espèce.
Nous savons réaliser des prodiges avec notre esprit, mais cela ne peut être le signe de notre supériorité – le vivant se perpétue et se déploie avec un génie qui semble bien se passer de mental au sens propre. Nous savons tous intimement que la biosphère peut se passer de nous aisément – et ces deux derniers siècles, elle se serait bien fait l’économie de notre présence quelque peu envahissante et particulièrement prédatrice.
Notre monde hyper-rationnel nous laisse peut-être encore penser que tout est maitrisable et analysable… Que la technologie est une réponse à tous nos soucis. Pourtant nous savons intimement qu’il s’agit d’une fausse promesse. Plus nous creusons les mystères du « réel », plus ils s’épaississent et plus nous éludons l’inévitable remise en question de nos modèle de société, plus nos options s’égrainent vite.
« Ce qui échappe à notre compréhension » n’est pas seulement une énigme de plus à percer – c’est également un indicateur intrinsèque donnant corps aux notions de « l’infini » et du « tout possible ». Pour autant, nous ne cesserons jamais de chercher à comprendre, car nous sommes habités par une saine curiosité. Toutefois de nouvelles voies d’évolution semblent être possibles par le dépassement de l’anthropocentrisme.
Nous nous devons de nous penser autrement…

Un poil d’histoire
L’homo-sapiens laisse des traces sur Terre depuis 250’000 ans au moins. Les indices les plus anciens de rituels chamaniques datent d’environ 50’000 ans avant notre ère. Cela établi l’animisme comme la spiritualité la plus ancienne, durable et généralisée dans les groupe d’hominidés – une spiritualité évolutive et très libre dans ses diverses expressions (rituels, art et architecture, objets divers, etc).
L’animisme des temps anciens n’a pas fondamentalement changé en comparaison des croyances actuelles – toutes cultures confondues. Un « esprit » peut être attribué à « toutes choses » et « toutes choses » forme un « Tout » infini et mystérieux. Une dimension « sacrée » était conférée aux éléments tels que la Terre et le ciel, la lune et les étoiles, les animaux et les plantes, les pierres et le bois, l’os, l’eau, etc – Le monde de l’invisible était vu comme naturel et logique – une métaphysique vécue dans chaque journée comme allant de soi.
Cette vision du monde part du principe que la nature et le cosmos, le visible et l’invisible sont les forces qui agissent sur nous, mais sur lesquelles nous pouvons aussi agir – l’idée étant d’entrer en lien avec les « esprits » sans désir de contrôle ou de domination. La création toute entière possèderait une « âme » (Gaya) à l’instar de l’humain, des animaux et des éléments. La question de notre position hiérarchique au sein de la création était sans objet.
Les notions de propriété – de surplus et de richesses – l’émergence de l’écrit pour les inventaires mais aussi les dogmes et les mythes – La liste des grands changements dus à la sédentarisations est longue et ces faits sont loins d’être anodins ou innocents d’un sentiment de toute puissance Humaine… Les guerres, le patriarcat, la domination par le nombre, la force ou le concept, tous ces phénomènes et bien d’autres apparaissent ou s’accentuent fortement avec les cultures sédentarisées.
Les chasseurs-cueilleurs vivent encore sur Terre et ils sont tous animistes. Aujourd’hui personne ne les jugeraient inférieurs pour n’avoir jamais vu un téléphone portable. Par contre, sommes-nous capable de tirer des enseignements de leur sagesse – celle d’humains n’ayant jamais vécu la séparation l’Homme VS la nature…?
Le Chamanisme Contemporain…

…Pour ne pas dire « le néo-chamanisme », un terme un peu fourre-tout et récupéré par des néo-gourous en soif d’adeptes bien argentés et admiratifs.
Les chamans contemporains sont nombreux dans les régions ayant conservé ce type de croyances. Une conception du « réel » présente partout sur le globe et dont la force réside dans la solidarité, les expressions rituelles en lien avec le réel entre autres pratiques invitant l’esprit à entrer en lien, voire en communion, avec la Création.
Alors, alors! Ce chamanisme est-il donc transposable dans notre société post-industrielle? Et bien, certaines avancées scientifiques pourraient bien confirmer l’existence concrète de la dimension métaphysique, voire mystique, de notre réalité bien concrète. Et ces mêmes érudits des sciences désignent – entre autres – l’animisme comme porteur de bien des sagesses reflétant étrangement des faits.
« l’illusion du réel » La physique démontre l’illusion du réel tel que perçu par nos sens. La masse d’un atome est proprement dérisoire par rapport aux effets de poids et de taille qu’elle produit à notre échelle. Et n’évoquons même pas l’intrication quantique qui défie l’espace-temps et autre bizarreries de la discipline…
« Non-localité de l’esprit » La non-localité de la conscience humaine est démontrée par de nombreux travaux scientifiques sérieux en neurologie et en neuroscience – il serait aussi vain de chercher l’esprit dans le corps humain que de chercher un présentateur dans un téléviseur.
« Pas de hasard » L’astronomie pose le postulat qu’il n’est pas plus probable que l’univers soit le fruit d’un hasard déterministe que d’assembler un avion en lançant toutes ces pièces détachées en l’air.
« Gaya » les biologistes s’accordent pour beaucoup sur la notion de « biosphère » dans le sens d’un organisme à part entière fait de l’ensemble de ce qui le compose naturellement. Les interconnexions et interdépendances observées reliant in fine l’ensemble du « vivant » évoquent étrangement un corps doté d’un esprit…
Nous devrions certainement repenser nos démocraties avec une logique néo-athénienne – Alors, ne pourrions-nous pas aussi transcender l’anthropocentrisme par une approche plus intégrative et surtout moins arrogante par une dynamique néo-animiste? Renouer avec le vivant en tentant d’effacer toutes distinctions hiérarchiques serait pourtant conforme à la réalité. Retrouver la conscience de notre première famille d’appartenance – la biosphère elle-même, et pourquoi pas l’univers entier.
Rassurez-vous, il n’y a aucune contre indication de retourner ensuite à son ordinateur… mais soulagé du devoir d’accomplir un destin supérieur et avec la force de la création à nos côtés.
Somme-nous seulement capable de penser notre unicité?


La Force du rituel
Nous tous avons des rituels du matin et du soir, du dimanche et des vacances…. Peut-être serait-il aussi temps de nous proposer des rituels qui rendent la vie précieuse, qui acceptent son mystère comme étant aussi sa beauté. Se proposer un temps de recentrage dans une juste proportion face au cosmos – insignifiante et remarquable à la fois. Voir nos capacités comme un dont biologique à utiliser avec sagesse et non comme un grade d’officier nous conférant des privilèges.
« Le Rituel » peut évoquer une chose inutile superstitieuse – obscure et inquiétante. On pense « vaudou » ou « secte ». Au demeurant, il n’existe aucun diplôme ou savoir particulier pour se proposer des espaces dédiés à l’intangible et à une certaine intériorité.
Choisir une branche morte et la brûler – collecter les feuilles d’un arbre et les placer sur l’eau – danser au claire de lune – écouter le silence et entrer en soi – seul ou en groupe… avoir régulièrement une parenthèse qui ne sert pas notre pôle rationnel nous permettraient peut-être d’accéder à des dimensions plus subtiles et non-moins valides , voire nécessaires.
Le rituel offre un cadre et des modalités pour laisser nos perceptions échappant à la logique se faire entendre – ce n’est pas insensé.
Ensemble – nous sommes plus que la sommes de nos individualités.
Nous avons besoin de relations humaines – nous dépendons les uns des autres pour nous construire une identité et nous développer en tant qu’être humain en général, cela n’ayant pas empêché que nous soyons de plus en plus isolés tout en étant de plus en plus nombreux.
Les « agoras », les maisons du peuple, les bistrots, les grands rassemblements et les places publiques, même les églises et les temples se vident ou disparaissent au profit d’un « chacun pour soi » et même d’un « seul contre tous ». Reclus dans nos maisons, protégeant nos biens de consommation, nous avons largement perdu le sens de « vivre ensemble ». Et ce n’est pas nos « followers » sur les réseaux sociaux ou nos bonheurs artificiels qui peuvent satisfaire l’aspect quasi vital des liens sociaux.
Cette émotion toute particulière d’avoir sa place dans un groupe de personnes avec lesquelles ont se sent serein et en confiance – dans une certaine chaleur humaine – avec un sentiment de solidarité et de respect allant de soi – nous la cherchons tous.
Un groupe bienveillant permet l’intensité de son expérience personnelle et la sécurité lors d’un rituel – en plus de la joie d’une appartenance sensée.
A défaut de « bienveillance » – notre besoin d’intégrer un groupe humain est assez fort pour nous pousser à choisir ce qu’il y a de moins recommandable – faute de mieux.
La bienveillance n’est pas un bisounours
Oui, la « bienveillance »! Veiller sur le bien-être de l’autre… Savoir apprécier cette attention en retour. Nourrir des valeurs et les traduire en actes…
Rejoindre un groupe de personnes – ou entrer en lien avec un seul individu demande une base de confiance. Cela relève du choix lucide et légitime d’attendre de la bienveillance des personnes que l’on côtoie et offrir les mêmes égards à notre entourage. C’est la base, en soi…
Nul besoin d’être méfiant pour se préserver de mauvaises rencontres – bien réelles, elles aussi. De l’expérience de vie – un peu – une tombée d’intuition – si, si – et une bonne dose de lucidité suffisent.

La bienveillance active sous toutes ses formes représente un moyen d’action puissant au service du changement de sa réalité, de ses perceptions et permet à son entourage d’en bénéficier et reproduire. L’action bienveillante à sa petite mesure se traduit toujours par des effets concrets et remarquables.
A la plage, chaque grande sable compte…
Créativité spirituelle
Les spiritualités chaminiques sont intimement liées aux traditions dites orales – qui n’étaient pas primitives pour autant. Les chamans – porteurs de récits et de légendes transmis oralement jouissaient d’une grande liberté d’interprétation. Un bon chaman se devait d’être singulier, original. Personne n’attendait de lui le respect d’un dogmes particulier ou de porter une tenue réglementée. En revanche, les chamans devaient savoir soigner et guérir – transmettre les acquis ancestraux – interpréter les rêves et les signes du réel – mener des rituels pour marquer les cycles naturels et sociaux en sens large (naissance et mort – saisons et cycle lunaires, etc) et enfin, être de sages conseillers pour résoudre les conflits et les situations exceptionnelles.
On observe dans les diverses traditions de chamans contemporains que cette approche libre et singulière reste d’actualité et permet au divers groupes d’appartenance de se côtoyer et de partager leurs connaissances sans concurrence ou sens de l’hérésie. Un chaman cherche à transmettre et profiter de ce qu’il peut apprendre – ainsi – il accompli le cycle vertueux de l’appel de la vie à elle-même par le « donner / recevoir ».

Etat de conscience modifié
L’ECM est un phénomène tout à fait naturel qui peut survenir lorsque nous rêvons ou pratiquons une activité artistique, par exemple. Il peut également être induit par la méditation ou grâce à des méthodes spécifiquement utilisées, comme l’hypnothérapie. Il existes également plusieurs substances psychotropes qui provoque l’ECM.
L’électroencéphalogramme d’un sujet en ECM montre que l’activité cérébrale se concentre dans l’hémisphère droit. Chaque hémisphère du cerveau à son propre champ de perception et ses attributions spécifiques.
A droite: intuition, créativité, perceptions spontanées, visualisations et visions, ressentis et émotions, le présent…
A gauche: Logique, mathématique, analyse, concepts, parler, lire et écrire, passé et futur…
Le côté gauche est largement surinvesti dans notre réalité contemporaine et pourtant notre biologie a bien prévu autant de « matière grise » pour le ressenti que pour le rationnel. Comme si nous étions fait pour trouver un équilibre entre ces deux polarités complémentaires.
Une pratique en vaut bien une autre (toutes arnaques mises de côté) pour expérimenter quotidiennement l’ECM. Offrir un peu plus régulièrement de l’espace à nos perceptions de l’hémisphère droit favoriserait sans doute un meilleur équilibre mental et une perception dite « normale » beaucoup plus riche.
L’état de conscience modifié n’est pas de la magie ou une expérience psychédélique mais une faculté qui nous est donnée à la naissance. L’ECM nous permet d’accéder à une dimension du réel sans le filtre analytique. Une pratique qui se potentialise fortement par la dynamique du groupe…
Le chamanisme propose la transe accompagnée pour accéder à l’ECM et, dans ce cas, un « guide » (chaman) veille à ce que le rituel se déroule en toute sécurité et dans la bienveillance.

L’inintelligible et l’inconnaissable
Au 21e siècle – plus que jamais – nos progrès techniques peuvent donner le sentiment qu’appréhender et comprendre « toutes choses » reste possible – au moins en théorie. Il y aura toujours une formule mathématique ou une pensée éclairante – à défaut d’une IA – capable d’écrire une formule et apporter la confirmation de notre notre génie.
L’infinité des réalités, la relativité de nos perceptions et leurs limites – la subjectivité manifeste de la phénoménologie en général devraient certainement nous mettre la puce à l’oreille – La prétention à la rationalité est proprement illusoire et vaine.
Il y a bien là un vertige – les acquis de nos capacités d’analyses et de compréhension révèlent aussi que le mystère du réel s’approfondi en proportion plus grande encore.
Peut-être que notre ignorance est une variable à considérer comme tangible, elle aussi? En maths, ça marche très bien avec des X… Car oui, l’inintelligible et l’inconnaissable sont des faits qui nous aideraient sans doute à comprendre notre place dans l’univers. La conscience de nos limitations aurait au moins ce mérite de passer par une rupture avec le modèle anthropocentrique. Car, reconnaitre son ignorance n’est-ce pas déjà la dépasser?
Cette humanité réaliste et humble serait possiblement celle qui lancera les bases solides d’un avenir enthousiasmant, jouissant pleinement du présent – le seul lieu où l’action est possible.
En conclusion…
Enstien disait : **le « TOUT » est toujours plus que la somme de ses parts**
En envisageant un arbre comme du bois de chauffe – ou un agrément ou encore une gêne pour un projet de place de parking – nous nous privons de notre relation intime avec notre « Mère la Terre ». Du reste – aucun biologiste sérieux ne pourrait placer une limite du « soi » et du « non-soi » d’un point de vue strictement cartésien – alors…
Il ne s’agit pas de s’adonner à une pratique plutôt qu’à une autres et encore moins de se bercer de superstitions – mais plutôt de retrouver en soi la conscience d’un GRAND TOUT dont nous sommes une simple et merveilleuse émanation. Notre place en son sein est remarquable et dérisoire – certainement pas indispensable! Il serait peut-être temps de nous penser comme des « invités » et non comme des « propriétaires »… Tout un programme!
La situation écologique est assimilable un organisme malade – La Terre souffre-t-elle de l’orgueil et du déni des Hommes devenus aussi mégalomane que sur-puissant? Nous nous sommes auto-proclamés « homme sage » (homo sapiens) – et bien admettons tous ensemble que c’est faux. Non-seulement cela est flagrant, mais c’est aussi devenu insoutenable pour notre espèce de le croire encore.
Il est si facile de démontrer que l’humanité n’est au centre de rien – mais peut-être devons-nous d’abord apprendre à nous défaire de ces vielles peaux qui ne demandent qu’à tomber?
Quelque que soit la route choisie – la quête de conscience élargie semble inévitable. Un dépassement radical de l’anthropocentristes doit advenir pour permettre la suite de notre histoire – mais en tant qu' »Homobiospherus » cette fois-ci.
Nous semblons condamné à une ère nouvelle – celle de la maturité – celle de la quête d’unicité avec notre environnement et nos semblables, L’ère de la conscience et de la sagesse est le seul chemin possible – « there is no alternative »
Il y a pire destin…
